Étape 1 : Dès le XIIIe siècle, Saint-Martin-de-Ré est un bourg actif, développé autour de son port, où transitent vin, sel, bois et blé. L’agglomération, structurée dès l’origine par un tissu de rues nord-sud, se densifie au XVIIe siècle avec l’édification de nombreux hôtels particuliers. L’activité portuaire, les vergers, les potagers et une vie urbaine animée façonnent alors une ville vivante et prospère. Au XVIIe siècle, Vauban qualifie Saint-Martin de « lieu le plus habité et le mieux bâti de l’île ». Il y fait construire d’imposantes fortifications, qui, sans bouleverser le tissu urbain, structurent durablement le paysage. La création de nouvelles voies facilite l’accès entre les portes de l’enceinte et le cœur de la ville, tandis que la place d’armes devient un espace public central. Au fil des siècles, la ville conserve son organisation en quartiers, dont certains à forte dimension religieuse. Plusieurs institutions s’y installent, comme l’hôpital, le couvent des Capucins, le gouverneur ou encore la Maison Centrale. L’urbanisation reste limitée dans certains secteurs comme autour de la citadelle ou à l’est de la ville. Le XIXe siècle marque un déclin du commerce maritime traditionnel, affectant les métiers liés au port. Toutefois, Saint-Martin conserve un rôle central sur l’île. Aujourd’hui encore, son patrimoine historique, son port et ses fortifications façonnent son identité, dans un équilibre entre vie permanente et attrait touristique. La commune compte un peu moins de 2 500 habitants et reste marquée par sa fonction historique de chef-lieu de l’île de Ré.
Étape 2 : Située en recul du port, la Rue de l’Orneau vous emmène vers les quartiers du vieux Saint-Martin. Son étroitesse ainsi que ses virages brusques répondent à une nécessité de tous les plans urbains de l’île de Ré : protéger du vent. Il est ainsi possible de circuler au travers de ces raises et venelles qui dessinent et donnent leur charme à la trame urbaine historique des villages rétais. Il est fréquent que ces ruelles soient empierrées de blocs de taille irrégulière, en souvenir de la période où les pierres de lest des navires étaient utilisées pour paver les chaussées. Le caniveau central servait à évacuer aussi bien les eaux de pluies que les eaux usées en permettant aux passants et charrettes de circuler sans se salir.
Les puits : Les rues de l’île de Ré sont marquées par l’absence de trottoirs et la présence de façades de bâtiments donnant directement sur la rue. Elles rythment le tracé des rues de leurs avancées ou décrochements. Ainsi de nombreuses petites places semblent être le fruit d’un élargissement des ruelles plutôt que d’une planification urbaine réfléchie. Ces quéreux, souvent placés à l’intersection des venelles, servent alors d’espace partagé pour les habitants. La présence d’un puits soulève ici la question de l'approvisionnement en eau potable des communautés rétaises. L’absence de cours d’eau douce sur l’île de Ré a longtemps été un problème résolu parle forage de puits, soit dans des espaces ouverts à la population, soit sur des parcelles privées. Ces puits ont longtemps eu une importance capitale puisqu’il a fallu attendre la seconde moitié du XXe siècle pour voir une conduite amener de l’eau potable sur l'île de Ré depuis le continent.
Étape 3 : Durant la période médiévale, les centres urbains sont organisés de façon que différents secteurs économiques soient regroupés par quartier. Cela est en partie dû à l’existence de guildes dont l’influence se faisait sentir sur des secteurs entiers de l’artisanat par exemple. Il n'était pas rare d’avoir des rues dédiées au commerce de vêtements ou de nourriture. Si ces quartiers ont aujourd’hui disparu, les noms des rues perpétuent cette mémoire. Ici la rue de la forge ainsi que la rue du four indiquent la présence d’activités et de structures importantes à la vie quotidienne rétaise. Les forges produisent tout autant les outils métalliques que les fers à cheval ou les cerclages de fer nécessaires à la construction de tonneaux. Le four est souvent la propriété du seigneur auprès du quel habitants doivent payer un droit pour l’utiliser. Chaque village possédait alors son propre forgeron dont la forge constituait un lieu de rassemblement. Le nom de rue de Cîteaux souligne les liens de l’île de Ré avec les communautés religieuses affiliées avec l’abbaye du même nom. Celles-ci ont souvent permis l’importation de savoir-faire agricoles comme la viticulture.
Étape 4 : La Rue Mérindot et la Place Anatole France (anciennement Place du Soir) permettent de découvrir et comparer différentes façades. Celles à pans de bois rappelant les constructions médiévales ou celles plus régulières des maisons de la Renaissance. On remarque que les ouvertures des façades de maisons à pans de bois soulignent la présence d’un commerce au rez-de-chaussée surmonté de quartiers d’habitation. Sous ces bâtisses se cachent souvent de nos yeux des caves qui permettaient d’entreposer des marchandises et denrées. Aujourd’hui, la majorité des façades de l’île de Ré sont rénovées et décorées selon les recommandations et obligations issues du plan local d’urbanisme (PLU). Ce plan préconise notamment l’utilisation d’une certaine palette de couleurs pour les volets des habitations rétaises : nuances de vert pour les façades badigeonnées à la chaux et de gris pour celles en pierre de taille. Bien sûr il existe quelques exceptions à ces règles, comme les deux maisons à volets rouges du vieux Saint-Martin, dont la légende veut qu’elles aient été le site de production de vinaigre, ce qui expliquerait la couleur des volets…
L’église actuelle de la ville doit son apparence unique aux ravages des guerres de Religion des XVIe et XVIIe siècles. Si nos yeux sont naturellement attirés par les élévations au style gothique qui subsistent, il faut aussi attirer son regard vers un trésor souvent oublié de l’édifice : son ancien portail, aussi de style de gothique, avec ses sculptures représentant aussi bien des personnages que des feuilles de choux frisé, un élément décoratif récurrent à la fin du Moyen Âge. La beauté des pinacles gothiques (situés à l’opposé du clocher) laisse imaginer celle de l’église d’alors, avant les destructions des guerres. L’église actuelle, dédiée à Saint-Martin, fait suite à une première église antérieure construite dans le style roman mais détruite durant la guerre de Cent Ans. Elle garde aussi en son sein, par des plaques commémoratives, les mémoires douloureuses des massacres des guerres de Religion et de la persécution des prêtres catholiques durant la Révolution.
Étape 5 : Cette rue est nommée en l’honneur du père de Madame de Sévigné, femme de lettre du XVIIe siècle. Celse Rabutin de Chantal était un noble dont le goût prononcé pour les aventures et les duels le mit en délicatesse avec le pouvoir royal. Cherchant à s’éloigner de celui-ci, il rejoint son ami le seigneur de Toiras sur l’île de Ré et trouve la mort lors du débarquement des troupes anglaises de 1627. Cette rue permet de découvrir le style des hôtels particuliers érigés par la petite noblesse et la bourgeoisie rétaises au XVIIIe siècle. Au début de ce siècle, le négociant Jean Masseau de Beauséjour, fait ériger l’Hôtel de la Baronnie après avoir acheté le titre de baron de Ré. On retrouve en façade les proportions régulières du style néoclassique avec ses travées verticales régulières et ses étages aux proportions réduites. Ici cependant aucune concession au commerce mais une grande porte signalant l’importance du maître des lieux. Les habitations et le jardin arrière furent occupés par une variété d’habitants. Au XIXe siècle, la Communauté Sainte-Marie de la Providence, de Saintes, y fit établir un pensionnat. Un autre bâtiment, au n°25, connut une utilisation similaire à la fin du XVIIe siècle avec l’établissement d’une école tenue par les religieuses de l’ordre de Saint-Vincent-de-Paul avant d’être fortement remaniée au XIXe siècle.